Marie-Flore et la scène aux Etoiles
La talentueuse et orageuse Marie-Flore se lance dans plusieurs concerts au Théâtre des Etoiles.
Peux-tu nous expliquer ton cheminement musical de tes premiers amours à aujourd’hui ?
Marie-Flore : De ma vie de jeune adulte car avant ce n’est pas forcément très intéressant, j’ai toujours écouté de la musique indé. Je commence donc forcément par Nirvana. J’ai ensuite des grosses phases avec le premier album de Muse, le premier album de Moby… Puis je tombe dans le garage rock des années 60, ainsi que toute la scène de la fin des années 70 avec Janis Joplin, Hendricks ou les Velvets Underground. Cela se termine par une passion amoureuse pour Léonard Cohen ou le groupe Brian Jonestown Massacre, plus moderne mais aux influences plus anciennes. J’ai un gros défaut : je ne suis pas quelqu’un de très curieux musicalement, donc quand quelque chose sort, je ne me rue pas dessus et je le découvre très tard. Mais cela a comme avantage que je suis peu biberonnée par ce qui sort régulièrement, mais plutôt par ce que j’écoute de moi-même.
Ton amour de la langue anglaise vient donc de tes influences musicales ?
Marie-Flore : Oui je crois, parce que j’ai toujours écouté ça. Très jeune, j’écoutais des groupes punk-rock et mon premier réflexe était de traduire les paroles pour comprendre ce qui se chantait. Naturellement je me dirige vers cette langue. Mais aussi car à ce moment-là j’ai très peu de références dans la musique française. Plus tard j’écoute beaucoup Bashung, Biolay ou Christophe, à qui j’ai fait écouter quelques morceaux du disque avant qu’il sorte car je voulais avoir son avis dessus. Concernant Biolay, je ne l’écoute pas tout le temps car je passe sinon relativement une mauvaise journée (rires). Mais je l’ai écouté beaucoup dans des périodes de ma vie où j’avais besoin non pas de me complaire dans une détresse mais plutôt d’être accompagnée.
Tu penses que l’on ne peut écrire que sur des périodes sombres ?
Marie-Flore : J’ai essayé d’écrire une chanson plus « joyeuse », cela partait très bien et puis au premier couplet… Je pense que l’on peut écrire sur tout, l’amour heureux, les enfants… Mais ce qui déclenche la création chez moi ce sont des pensées plus dures. Pendant la création du disque il m’est souvent revenu que j’étais un peu monomaniaque dans le thème de l’album. Cela ne me dérange en rien car il s’agit du fil conducteur du disque. La crainte d’être répétitive m’a effleurée mais, finalement, je ne crois pas. Et puis en dehors de mon travail, les albums qui m’ont le plus percuté et touché ne sont jamais les plus heureux.
Le français est-il plus risqué que lorsque tu sortais ton premier album en anglais ?
Marie-Flore : Il y a sans doute une sorte d’impudeur à chanter en français mais je m’en suis rendu compte quand j’ai fait écouter mes chansons, pas pendant l’écriture. « Tu es allée un petit peu loin quand tu racontes tout ça, vas-tu assumer de chanter tout ça sur scène? » Il y a une forme de mise à nu, c’est évident, mais ce n’est pas volontaire. C’est, de fait, plus impudique que si je me « cachais » derrière de l’anglais. Que ce soit en français ou en anglais je n’ai en tout cas toujours écrit que sur l’amour. Cela évoluera peut-être mais jusqu’à présent il n’y a que ça qui m’intéresse.
Comment te sens tu alors que ton album va enfin être découvert du grand public ?
Marie-Flore : J’ai l’impression que c’est mon premier disque donc j’ai pas mal d’appréhension mais aussi une grande envie d’y aller. Les premières marques d’estime me font plaisir même si je n’ai fait écouter l’album qu’à très peu de personnes dans mon entourage. C’est d’ailleurs étrange car c’est un pan de ma vie qu’ils connaissent parfaitement, mais ils vont sans doute découvrir le résultat final maintenant seulement. C’est en tout cas l’estime du public que je recherche. Ce qui serait assez sympa par exemple, c’est que je fasse un concert et qu’il y ait des gens (rires). C’est plus là que va s’opérer la réelle reconnaissance car c’est préparer la tournée et rencontrer les gens en live qui m’excite le plus. Je serais si heureuse que des personnes reprennent mes chansons en live.
Outre la sortie de Braquage tu te lances donc dans plusieurs concerts. La scène a toujours été quelque chose d’évident pour toi ?
Marie-Flore : Le live a toujours été très compliqué pour moi. Pendant longtemps ne faire que des studios me convenait. Je me demandais avant de monter sur scène ce que je faisais là et pourquoi je m’imposais ce stress. A part mes chansons, je me demandais ce que j’avais à livrer d’autre. Le déclic arrive il y a quelques années, quand j’ai la chance de faire les premières parties des Zénith de Julien Doré. C’était fou. J’ai enfin ressenti du plaisir, l’envie de « prendre » la scène et de l’habiter, ce que je n’avais jamais ressenti durant dix ans de concerts avant ça. C’est peut-être l’opération magique entre mes nouvelles chansons et là où j’en étais dans ma vie artistique qui a fait que, enfin, j’arrivais à briser cette petite souffrance. Si le stress et le trac sont toujours là aujourd’hui, j’ai cette fois aussi pensé cet album en le projetant en concert.
Tu t’es beaucoup impliquée pour créer le spectacle que tu voulais ?
Marie-Flore : J’ai envie de faire un gros travail sur les lumières plus que sur un décor particulier qui, lui, restera humble. J’aimerais reproduire l’ambiance de mon clip Braquage. L’émotion sera différente de l’album car chanter en live provoque des sensations autres. Idem pour les arrangements qui seront un peu retravaillés. Cela donnera j’imagine une énergie différente, avec des chansons plus longues. J’aimerais en tout cas « écrire » ce spectacle, avec un début, un milieu et une fin. Je peux travailler avec des producteurs et cela me donne la chance d’explorer d’autres choses. J’ai aussi envie d’être parfois au piano et de revenir à mes premières amours. Ce sera en tout cas pour moi un moment très émouvant.
Il y a quelques années tu disais que tu avais deux rêves : sortir un album et nager avec des requins. On doit aller où pour te voir plonger ?
Marie-Flore : Cela reste encore de l’ordre du rêve ! J’ai une passion requin qui ne me vient pas des films mais plutôt de documentaires. Parce que ce sont pour moi les rois des animaux, parce qu’ils dégagent un calme, un force, une intelligence extrême… C’est toujours dans un coin de ma tête et j’espère vraiment réussir à le faire un jour.
Propos recueillis par Jérémy Attali
Crédit photo : Anoussa Chea
Marie-Flore en concert au Théâtre des Etoiles les 25 novembre, 2 et 9 décembre
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